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Bandeau théière calli

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mardi 14 février 2017

Pensée du jour - Sima Qian


"En n'oubliant pas les événements passés, 
nous devenons maîtres des événements à venir"

Sima Qian

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Sima Qian (司马迁sīmǎ qiān) succéda à son père, en 107 avant J.-C., en tant qu'annaliste de la Cour de l'empereur Wudi (de 141 à 87 avant J.-C.), pendant la dynastie Han. En même temps qu'historien officiel, l'annaliste jouait également le rôle d'astrologue et de conseiller impérial

Ce grand mandarin était un érudit et savait déjà lire les classiques à l'âge de 10 ans. Adolescent, il partit parfaire son éducation générale en se rendant dans plusieurs provinces et fut plus tard missionné officiellement pour inspecter la ville de Kunming, dans le Yunan, que l'empire venait de conquérir.

Ce fut le premier historien qui tenta de décrire l'histoire de la Chine depuis son émergence et tous les historiens impériaux qui suivirent se sont grandement inspirés de ses écrits regroupés et connus sous le nom de shǐjì (史记). Ces mémoires historiques comportent plusieurs biographies de grand noms de l'Histoire, dont notamment celle de Confucius.

En 99 avant J.-C., Sima Qian provoqua l'ire de l'empereur en plaidant pour Li Ling, un officier qui avait été accusé de trahison. La sanction était à choisir entre l'exécution ou la castration et l'historien choisi de rester en vie, malgré la honte et le déshonneur, afin d'achever son oeuvre car il en avait fait la promesse à son père Sima Tan. C'est ainsi que l'empereur finit par l'amnistier et en 96 avant J.-C. le nomma secrétaire privé, poste qui était traditionnellement réservé aux enuques.


lundi 13 février 2017

Spectacle et propagande

Je ne me rappelle plus où j'ai trouvé ce flyer la semaine dernière qui fait de la publicité pour un spectacle de danse et de musique chinoises grand public intitulé SHEN YUN 2017, qui se produira au Corum de Montpellier les 25 et 26 avril prochains. Sur le triptyque, on voit des photos de danseurs et danseuses chinois acrobatiques et élégants.


D'habitude, je ne suis pas très inspirée par ce type de spectacle hyper commercial, mais j'ai tout de même lu la plaquette et j'ai vu écrit en tout petit, en bas du dernier volet : "Shen Yun Performing Arts est une organisation à  but non lucratif (prix des places de 49 € à 109 € tout de même). Sa mission est de faire revivre 5000 ans de culture traditionnelle chinoise. Shen Yun ne peut pas se produire aujourd'hui en Chine." Ah ? Une association américaine qui promeut les arts chinois et ne peut se produire en Chine ? Je me posai des questions sur cette impossibilité.

C'est ainsi que je découvris que l'association Shen Yun n'était autre que Falun Dafa, plus connue sous le nom de Falun Gong (littéralement : Pratique de la roue de la Loi"). Je retrouve un article de Libération du 26 mars 2014 qui s'intitule "Au Palais des Congrès, à Paris, le spectacle à la gloire du mouvement Falun Gong avance masqué".  L'auteur de l'article, François-Xavier Gomez, a lui aussi décelé les petits caractères mentionnant le nom de l'association et découvert le lien avec Fallun Gong, qui, explique-t-il, "est le nom officiel du mouvement politico-religieux que le régime de Pékin appelle 'la secte Falun Gong'", expliquant que la Chine a mis ce groupe hors la loi et ajoutant qu'il ne fait cependant pas partie de la liste des sectes répertoriées par la Miviludes, qui lutte contre les dérives sectaires.

Ce mouvement qui repose sur la pratique du Qi Gong, de la méditation, d'une "mystique bouddhiste et d'un moralisme religieux", a été lancé en Chine en 1994. Le PCC l'aurait un temps promue car le Qi Gong est censé améliorer la santé (certains membres du Parti étaient même des adeptes), mais le nombre d'adeptes augmentant de façon incroyable, le parti y aurait vu un mouvement dangereux pour sa survie, son enseignement risquant de l'éloigner des fondamentaux institutionnels et de mener, selon eux, à une révolte de grande ampleur. En 1999, un grand nombre de sympathisants du groupe furent emprisonnés, certains ont parlé de persécutions. 

Le Quotidien du Peuple, organe officiel du PCC, consacrait une bonne partie de sa première page, fin juillet 1999, à la "solennelle bataille de politiques et de pensée", accusant Li Hongzhi, dirigeant du Falun Gong, de se "comporter comme un dieu et d'avoir cherché à se substituer au gouvernement", ainsi que d'avoir trompé le peuple et provoqué la mort de centaines de personnes en s'opposant à la science et à la médecine.

D'après le Petit Journal de Hong Kong (lien en bas d'article), le PCC aurait été accusé d'arrêter arbitrairement les membres du Falun Dafa et de les détenir sans charges. "On parle fréquemment, y est-il écrit, de violences policières, de racket, de rééducation par le travail, de séances de lavage de cerveau, de tortures, d'internement en hôpital psychiatrique et même de prélèvement d'organes sur les prisonniers", ce que Pékin a fermement démenti. L'auteur ajoute qu'en 2000, Amnesty International dénombrait 77 morts dues aux violences policières dont 42 femmes, 450 personnes auraient été condamnées à la prison, 600 envoyées en hôpital psychiatrique et 10.000 dans des camps de rééducation, chiffres difficilement confirmables étant donné l'absence de source neutre récente et la réticence des autorités chinoises à ouvrir la possibilité d'investigations venant d'étrangers sur ce sujet. Les informations viendraient d'articles d'un journaliste du Wall Street Journal, Ian Johnson, ce qui lui aurait valu le prix Pulitzer en 2001.


Le dirigeant du mouvement

Le dirigeant du mouvement, Li Hongzhi s'est expatrié aux USA en 1998 et, toujours selon l'article de Libération, ne se serait plus exprimé en public depuis une interview donnée en 2001 au magazine Time Weekly où il aurait parlé de sa conviction de l'existence des extraterrestres. Je n'ai pas retrouvé la trace de cet article, mais j'ai trouvé un article de Pékin qui le mentionne également, et le site falun.fr parle d'une "civilisation extraterrestre scientifique".

Le journaliste initiateur de l'article de Libération nous fait savoir que ses tentatives pour contacter un responsable ou un porte-parole de Shen Yun sont restées vaines. Quant à la branche française de Falun Dafa, "Lotus Sacré", elle n'aurait pas répondu non plus à ses e-mails. La conclusion du journaliste : "Falun Dafa a le droit de promouvoir ses valeurs et son combat contre un régime dont les atteintes aux droits de l'homme sont régulièrement dénoncées. L'ennui, c'est que le public n'est jamais informé qu'il va assister à une opération de propagande où, entre les tableaux qui célèbrent 5000 ans de culture divine, se glisse une scène où des adeptes de Falun Gong sont tabassés par des sbires communistes. L'opacité et le refus de communiquer sont un autre problème", ajoutant que "Si Falun Gong n'est pas une secte, elle en utilise en tout cas les méthodes.

Sur le site mystico-scientifique http://newsoftomorrow.org/abductions/visions/george-a-filer-la-veritable-histoire-du-falun-gong-le-maitre-li-sur-les-abductions-extraterrestres vous pourrez lire un entretien entre un certain George A. Filler et Li Hongzhi, où ce dernier évoque ces extraterrestres, qui auraient été, d'après lui, "autrefois des humains sur terre". 

Un autre article paru dans Libération du 21 juin 1999, écrit par Patrick Sabatier, intitulé "Li Hongzhi, 48 ans, grand maître de l'Ecole de la roue de la loi de Bouddha, a organisé à Pékin une manifestation qui a fait trembler le pouvoir. Le grand Gong en avant." L'article mentionne le siège du pouvoir chinois par plus de 10.000 adeptes de FG au centre de Pékin. Si le parti voit en Li un chef mystico-politique dangereux, celui-ci affirme mépriser la politique et le pouvoir, être opposé à toute violence, n'avoir aucune organisation, aucun programme et pas de QG. "Je ne dirige rien, je me contente de montrer la voie", selon ses propres termes.

L'auteur de cet article avoue être inquiet lorsqu'il entend "maître" Li affirmer dans l'un de ses écrits que "Des examens scientifiques ont prouvé que mon corps émet de rayons infrarouges, ultraviolets, des ondes subsoniques, des rayons gamma, des forces magnétiques et un bombardement de neutrons à des niveaux 80 à 170 fois supérieurs à ceux d'un être ordinaire" et présenterait son savoir comme "le plus fondamental, le plus mystique et le plus surnaturel" révélé aux humbles mortels. 

Monsieur Li dirige donc des "associations" dans le monde et prodigue son enseignement via de grands spectacles ainsi que dans deux livres (Zhuan Falun et China Falun Gong), des vidéos, des conférences (gratuites) et une présence sur Internet. D'après Sabatier, le tout serait un "cocktail abracadabrant de mystique traditionnelle chinoise remise au goût d'un pays qui découvre la modernité occidentale : emprunts au taoïsme et au bouddhisme, animisme et alchimie s'y mêlent à des références pseudo-scientifiques  venues de l'informatique ou de la physique quantique, le tout mis à la sauce d'une morale confucéenne puritaine". Ce "gourou" promettrait aux adeptes "l'acquisition de plus de 10.000 pouvoirs surnaturels, de la clairvoyance (par l'ouverture d'un troisième œil placé comme un écran de télé derrière le front) à la lévitation, en passant par la quasi-immortalité du corps."

Monsieur Li insiste pour dire que le Falun Gong n'a rien d'une religion, qu'ils n'ont aucun temple, ni rituels ni pasteurs et que chacun est libre de participer à leurs activités ou des les abandonner. Rassurant, il indique ne s'intéresser à rien de ce qui passionne les gens "ordinaires" comme la télé, le karaoké ou le sport... Mais il aime visiblement le grand spectacle puisqu'il promeut SHEN YUN qui se produit un peu partout dans le monde, et donc à Montpellier bientôt. Mais que veut donc le "maître" ? Sa réponse : "sauver l'humanité corrompue des démons qui sont partout, face au déclin de la moralité et des valeurs, de la criminalité galopante, la drogue, l'homosexualité, le goût du lucre et l'envie". Une sorte de messie, en somme...

Quelques sources :
Post-scriptum :

Toute information vérifiable qui peut confirmer, infirmer, étayer ou éclairer certains points de cet article est le bienvenu.


mercredi 8 février 2017

Concert de musique chinoise

Hier soir, l'Institut Confucius de Montpellier -ICM- nous a convié à un concert de musique et danses chinoises avec des membres de la troupe artistique de l'Université des Sciences Electroniques et Technologiques de Chengdu. Les étudiants étaient accompagnés de leurs enseignants BEN Lide, professeur et compositeur de Erhu et SU Wenbo, baryton diplômé du Conservatoire de musique national de Chine.

Les instruments utilisés sont :

Le ERHU (二胡 - èrhú)




Probablement originaire d'Asie centrale ou de Mongolie, c'est un instrument à cordes (Huqin). Son nom, composé de "Er" = deux, et "Hu" = barbare, veut dire qu'il ne possède que deux cordes. C'est cette particularité qui rend l'instrument particulièrement difficile à jouer.  Le erhu, ou er-hu, se compose d'une petite caisse de résonance en bois recouverte d'une peau de serpent ou faite à partir d'une calebasse, d'un manche en bois, de deux cordes (ré et la) et de deux chevilles. On en joue avec un archet. Traditionnellement utilisé dans l'opéra chinois, il revient avec force depuis une vingtaine d'années avec des jeux très variés allant du classique occidental à la création contemporaine.

Le PIPA (琵琶 - pípa)



C'est un instrument traditionnel à cordes pincées, de la famille du luth. On en trouve des mentions dans des textes du IIe siècle avant notre ère et sa version japonaise est connue sous le nom de Biwa. Le Biba, nom du néflier en japonais, provient du chinois pípa guǒ, qui indique un fruit en forme de nèfle. L'instrument comporte 4 cordes, en soie pour les traditionnels mais bien souvent à présent métalliques, une caisse sculptée dans un bloc de bois unique, un manche court évasé et 4 chevilles sur un cheviller incliné. La table d'harmonie est constituée de 30 frettes en bois. Sa sonorité peut rappeler un peu celle de la mandoline italienne.

Le DIZI (笛子 - dízi)




Le Dizi (prononcer "Tidzeu") est la flûte traversière traditionnelle chinoise. Fait de bambou, son cylindre est percé de 12 trous, dont un portant une membrane de roseau ou de bambou. Ses extrémités sont ornés d'os ou de corne. Parfois gravé d'un poème classique et de la signature du fabricant, il peut aussi porter des lanières de tissus décoratives. Deux sortes de Dizi peuvent se trouver : le bangdi, qui rappelle les chants d'oiseaux, est plus courant dans le nord de la Chine, et le qudi, que l'on trouve plutôt dans le sud et avec lequel on joue des mélodies plus douces et moins syncopées que dans les régions septentrionales.

Extraits du concert d'hier soir à la Maison des étudiants Aimé Shoening, Espace Richter :




La danse des éventails

L'origine de la danse des l'éventails chinois 扇子舞 (shànzi wǔ) est très probablement rituelle et ses mouvements élaborés n'ont, pense-t-on, que peu changé depuis 4.000 ans. Utilisé comme protection contre le soleil ou les vents de sable, les éventails utilitaires étaient conçus à partir de grandes feuilles, de plumes, de bambou, voire de jade dans certains cas, ou encore de soie ou papier ; ceux que l'on utilise pour la danse sont principalement en tissu ou en papier. 

L'histoire de cette danse cérémonielle remonterait à l'âge néolithique, à l'époque des Yang Shao, au IVe millénaire avant notre ère. Dans le courant du Xe siècle, la pratique s'est scindée en deux types distincts : civil et militaire. De nos jours, les ethnies minoritaires de Chine ont développé chacune une danse propre à leur culture et des variantes existent également dans plusieurs pays d'Asie.

La chorégraphie de chacune de ces danses, la plupart du temps effectuées par plusieurs danseurs ou danseuses, n'est pas due au hasard, les mouvements minutieux ont tous un sens bien précis, d'où l'importance de chaque détail. Dans le style Yang Ge, les danseurs sont costumés et maquillés de façon prononcée ; leurs gestes amplifiés sont une sorte de mime exagéré d'une scène, que celle-ci soit tirée de la vie agricole ou d'une intrigue historique ou amoureuse.

Voici un extrait d'une danse de l'éventail, dansé par une étudiante de l'Université des Sciences Electroniques et Technologiques de Chine à Chengdu. Le spectacle était organisé par l'Institut Confucius de Montpellier hier soir.





mercredi 1 février 2017

Fête des lanternes - 元肖节

Le jour, ou plutôt le soir de la Fête des lanternes (元肖节- Yuan xiao jie), c'est la lumière qui clôt le cycle des festivités du Nouvel an chinois.


 A cette occasion, les familles vont se promener dès que la nuit tombe, portant chacun une lanterne. Ces dernières peuvent être des traditionnelles Hua Deng (花登) faites de papier où figurent des modèles régionaux qui rappellent souvent des scènes de mythes et légendes, mais les modèles plus tendance ou plus populaires se voient de plus en plus.

Ce jour-là, la tradition veut que l'on mange de la "soupe des lanternes" faite de boulettes de farine de riz farcies et bouillies, dont la forme rappelle les lanternes ronde, symbole de la plénitude. On joue aux devinettes (le jeu date des Song -960-1279), on va voir des spectacles de rue comme la danse du lion, les tambourins, les feux d'artifice. Et surtout, on fait beaucoup de bruit pour éloigner le mauvais génie de l'hiver, représenté par le lion ou le dragon. 


La tradition de la Fête des lanternes remonte à loin avant notre ère ; l'année se divisait alors en trois parties ; elle commençait le 15ème jour du premier mois lunaire et l'on fêtait alors l'anniversaire d'une divinité céleste : Tian Guan Dadi, qui menaçait de brûler la capitale. L'idée vint à l'un des festoyeurs de proposer à chacun d'accrocher une lanterne rouge à sa porte de façon à ce que Tian Guan Dadi s'enfuie, croyant la ville incendiée. Peu à peu, cette version fut remplacée par une autre plus réjouissante : on dit que c'est un conseiller impérial qui, pour permettre à une servante du Palais de sortir pour voir sa famille, avait fait allumer ces lanternes. Mais certains y voient une réplique d'une tradition bouddhiste où l'on allumait des lampes pour honorer les dieux dans les temples.


A Montpellier, le soir de la Fête des lanternes, cette année le 28 janvier 2017, un groupe de sinophiles s'est réuni au cœur de la ville ancienne, à l'instigation de l'Institut Confucius, afin d'admirer la danse du lion chassé par les cymbales et de voir les lanternes chinoises, accrochées comme des illuminations de Noël, s'éclairer simultanément rue de la Loge. Certes, les lanternes étaient électriques, mais l'honneur de la célébration était sauf et le Maire, malgré une petite pluie et un grand vent, est passé dire quelques mots et jouer des cymbales avant de partir pour la Russie.